Un peu de nous, un peu de moi

Il y aura toujours des méchants #2

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Temps de lecture estimé : 3 minutes

En janvier dernier, j’expliquais mes raisons de ne pas avertir mes enfants de l’actualité. Je pensais qu’ils étaient trop petits pour ça (5 at 2 ans). J’attendais leur questions, je guettais le moindre signe. On les a protégé. Personne en a parlé à l’école maternelle, encore moins à la créche. J’avais également fait le choix de ne pas en parler dans ma classe de moyenne section.

Il y aura toujours des méchants. Mais là c’est différent. 

Je savais que la minute de silence aller être appliquée en classe d’élementaire. Dans ma classe et dans celle de ma fille. Notre ministre nous avait prévenu que nous devions faire une heure de débat en classe avant de faire la minute de silence. Ma fille allait donc être en première ligne. J’ai donc pris les devants en lui expliquant la situation de façon succincte dès le samedi. “Quelque chose de très grave s’est passé vendredi soir à Paris, des gens qui écoutaient un concert, assistaient à un match de foot ou mangeaient avec des amis à la terrasse d’un restaurant ont été tué par des méchants. Les adultes sont très inquiets mais la police, les militaires, les pompiers sont là pour nous protéger. Les enfants seront aussi en sécurité avec leurs parents et à l’école. Vous allez en parler en classe.” Sur le moment elle n’a pas eu de questions. Je lui laissais le temps d’ingurgiter les informations. Le lendemain, j’ai cru qu’elle n’avait pas compris. Elle a traduit mes informations : “c’est des voleurs qui ont tué des gens à Paris”. Mais qu’est ce qu’ils voulaient voler? Plutôt que de m’acharner à lui faire comprendre des mots comme kamikazes, martyrs, assassins, terroristes. J’ai trouvé que les voleurs de liberté était bien approprié.

Grâce à elle et ses questions, j’ai pu affronter les interrogations de mes élèves et dénouer les confusions devant ma classe dès le lundi matin.

Comment on parle des attentats à l’école?

Chaque enseignant est libre d’en parler comme il le souhaite, mais voici comment J’ai organisé la journée dans ma classe de CE1 :

  • petite introduction / sondage : Qui a regardé les informations à la télé ce weekend? Qui en a parlé avec ses parents? Qui ne sait pas du tout ce qu’il s’est passé? Résultat dans ma classe (7 ans en CE1) : 30% ont regardé la télé, 80% en ont parlé avec les parents, 20% ne savent rien.
  • partage des informations, vérification des informations dans les journaux spécialisés pour enfants (merci Astrapi et Le petit quotidien), questions libres, toutes les questions sont notées au tableau mais toutes n’ont pas eu de réponses (les thémes de religion, idéologie ou géopolitique étaient inadaptés).
  • Ecriture et dessin personnel : ce que je ressens après les attentats. Certaines productions font froid dans le dos.
  • Debat sur la paix : j’ai choisi plusieurs visuels issus de twitter principalement, des artistes, dessinateurs, amateurs ou journalistes. L’objectif était de distinguer l’expression de la tristesse et l’espoir de paix. Les visuels les ont obligés à s’exprimer sur leurs sentiments. Le débat a été très intéressant.
  • Dessiner pour la paix : présentation des symbole de paix et de la colombre de Picasso peinte pour le congrés de la Pais en 1949 (l’histoire est en perpétuelle répétition, ne l’oublions pas!), les autres colombes de Picasso et celles de Matisse. Pour terminer cette journée éprouvante, nous avons commencé à créer une fresque commune (encore en cours de réalisation).

Quand j’ai relu les écrits de mes élèves j’ai compris qu’ils étaient rassurés. J’avais accompli ma mission malgré mes maladresses, mes hésitations, ma voix qui tremble, et les larmes aux yeux. Nous ne sommes pas des robots.

Je garde cependant un goût d’inachevé, ce travail ne sera jamais fini car il y aura toujours des méchants. 

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1 Comment

  1. Très belle approche : j’aurais dû venir dans ta classe pour t’écouter ;-). Ici, j’ai été très brève quand j’en ai parlé à mon fils et j’ai été un peu inquiète et en colère qu’on lui ait donné des détails sordides à l’école. Ce n’est pas à cause de la maîtresse – les détails sortaient de la bouche des enfants qui ont dû trop regarder la télé. Là franchement je comprends pas les parents. Informer les enfants c’est une chose : les mettre 48h devant les images de ces horreurs c’est honteux. Gros bisous.

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